Migrants de France. Que s'est-il passé ce 23 novembre 2020 ?

Exilés, invisibilisés, chassés comme des chiens errants aux abords des villes, les migrants ou la face indigne de l'État.

Ils étaient environ 3 000 Afghans pour la plupart mais aussi Somaliens, Éthiopiens, Soudanais, chassés  en juillet 2020 de la porte de La Chapelle ou de La Villette  (75) vers la commune d'Aubervilliers (93) ou de là vers celle de Saint-Denis (93)

Toute leur vie enfermée dans un sac poubelle ou un sac à dos, ils se sont recroquevillés peu à peu, et depuis le mois d’août 2020, sous une bretelle d’autoroute près du Stade de France à Saint-Denis. 

Et soudain, le 17 novembre 2020, les Préfectures de Paris, d’Île de France et de Saint-Denis ont décidé  qu’elles en avaient assez de les voir.

À l’aube, les migrants furent alors embarqués sans ménagement et emmenés après des heures et des heures d’attente, parce que examinés un à un pour cause de Covid19, vers des centres d’accueil et des gymnases, des lieux où on ne fait que reculer pour mieux sauter.

Mais des centaines d’autres ne purent jamais atteindre les bus dans lesquels ils devaient s’installer, le nombre d'exilés présents ayant été sous-évalué. Livrés à eux-mêmes, sans autre solution, ils furent chassés par des coups de matraque, des gaz lacrymogènes et des grenades de désencerclement.

Que s'est-il passé sur la place de la République ?

Le lundi 23 novembre 2020, afin d’alerter sur la situation de ces exilés, des associations comme Utopie56 organisèrent, de manière pacifique, un campement Place de la République à Paris.


Place de la Bastille, Paris 23 Novembre 2020.


La préfecture de police tenue par Didier Lallement, dépassé par les événements qu'il n'a pas vu venir, dépêcha sur place la Direction de la Sécurité Publique (DSPAP), dont les fameux de la BAC habitués à taper sur tout ce qui bouge, au lieu de la Direction de l'Ordre Public (DOPC) avec sa hiérarchie bien structurée et sa maîtrise des techniques adaptés au maintien de l'ordre.

Les plus hautes autorités du pays avaient ainsi décidé : chasser ces migrants que l'on ne saurait voir dans Paris !

Ainsi, une heure après s'être installés sous l’œil du Génie de la Liberté et de la colonne de Juillet où sont inscrits les noms des victimes des journées révolutionnaires de juillet 1830, jetés de leurs tentes renversées telles des poubelles pleines d’immondices (video) et à coup de matraques, coup de pieds, croche-pieds et gaz lacrymogènes, migrants et associations étaient délogés. Élus (Esther Benbassa, Danielle Simonnet, Audrey Pulvar, Ian Brossat, Éric Coquerel...), journalistes (Remy Buisine...) et avocats présents,  violentés (video avertissement) et nassés.

Absence totale de coordination entre les unités. Absence totale de tentative de médiation avec les associations et de recherche de solutions. Taper dans le tas - un commissaire divisionnaire de la BAC 95N fut même pris en flagrant délit de croche-pied fait à un migrant qui atterrit de tout son long sur l'asphalte juste à côté d'une trottinette -  était la réponse donnée à une exigence sociale.

Et la suite ?

Dans ces échauffourées, certains migrants perdirent leur sac de couchage, leur sac à dos, leurs chaussures et furent obligés de quitter Paris, à pied (video, et video), pour se rendre sous bonne escorte policière vers Saint-Denis, Saint-Denis d'où ils venaient. D'autres, par ces temps de crise sanitaire et de trêve hivernale, errèrent toute la nuit dans Paris (video).

Gérald Darmanin, découvrant ces images de la honte, se dit choqué, se retourna contre Didier Lallement en posant la question des responsabilités individuelles pour les forces de l'ordre et lui exigea un rapport pour le lendemain. Puis, il s'auto-congratula de la saisine de l'IGPN sommée de remettre un rapport sous 48 heures, rapport qu'il rendrait public.

Mais ce que ne dit pas Gérald Darmanin, c'est que l'IGPN - cet organe si décrié dont la refonte est exigée par les citoyens et qui n'a reconnu que 2 cas d'infractions sur 368 de violences policières - n'est pas autorisé à enquêter sur la responsabilité des supérieurs hiérarchiques. Mais l'IGA, l'Inspection Générale de l'Administration et s'il y a saisine du ministre.

La France, la loi et la dignité humaine

Malmenées, les associations ont tout de même pu, ce lundi 23 novembre 2020, rendre visibles ceux qui erraient en toute invisibilité hors des murs de Paris, chassés à coups de matraques, de gaz lacrymogènes... (video de Utopia 56)
  • La France enfreint les règles édictées par les traités internationaux qu'elle a signés et qui ont force de loi.
Par un jugement rendu le 2 juillet 2020 et devenu définitif  le 2 octobre 2020, la France a été condamnée par la Cour Européenne des Droits de l'Homme à dédommager des migrants obligés de vivre dans la rue dans des conditions particulièrement indignes.
  • En évacuant de la sorte des exilés, la France ne respecte les dispositions de l'Article L345-2-2 du Code de l'action sociale et des familles qui rend illégale ces actions. 
Ce que dit ce texte :

Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence.

Cet hébergement d'urgence doit lui permettre, dans des conditions d'accueil conformes à la dignité de la personne humaine et garantissant la sécurité des biens et des personnes, de bénéficier de prestations assurant le gîte, le couvert et l'hygiène, une première évaluation médicale, psychique et sociale, réalisée au sein de la structure d'hébergement ou, par convention, par des professionnels ou des organismes extérieurs et d'être orientée vers tout professionnel ou toute structure susceptibles de lui apporter l'aide justifiée par son état, notamment un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, un hébergement de stabilisation, une pension de famille, un logement-foyer, un établissement pour personnes âgées dépendantes, un lit halte soins santé ou un service hospitalier.

L'hébergement d'urgence prend en compte, de la manière la plus adaptée possible, les besoins de la personne accueillie, notamment lorsque celle-ci est accompagnée par un animal de compagnie.

Loi Sécurité Globale 

La France, pays de la Déclaration des Droits de l'Homme, classée 31ème pour les libertés individuelles, ne se glorifie pas avec la Loi Sécurité globale visant à interdire les images des violences policières par son article 24 (exiger le floutage, long et technique, revient à interdire ces images et en particulier les images en direct).
Or, sans ces images, il n'y aurait pas eu de médiatisation des souffrances et mépris infligés, ce 24 novembres 2020,  aux demandeurs d'asiles arrivés en France depuis de longs mois. Pas de saisine de l'IGPN. Pas de rapport remis sous 48 heures non plus (Rapport  du 26 novembre 2020 de l'IGPN).

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Autres images

Articles de journaux (mise à jour du 29 novembre 2020)

Retrouvez notre communiqué sur le site de notre mouvement politique, citoyen et humaniste Nous Demain.
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